aurely a écrit:
Peux-tu nous parler de ta première session à Todos ?
Ma première session à Todos Santos reste encore aujourd'hui l'une de mes toutes meilleures sessions. Avec mes deux compères qui avaient déjà plusieurs saisons d'expérience à Todos, nous sommes partis de San Diego à 3h du matin. Mon anticipation pendant le trajet en bateau était extrême. C'était le lever du jour et il y avait beaucoup de brouillard. Dès la sortit du port d'Ensenada, sur le bateau, la longue houle puissante du Pacifique s'est faite sentir et n'a cessé de grossir en approchant des îles. Quand les deux îles sont apparues, le capitaine a décidé de faire le tour plutôt que de passer comme de coutume entre les deux îles. Mes amis m'ont expliqué qu'ils n'avaient dû faire le tour qu'une fois dans le passé et cela à cause de la taille des vagues !
Rien de tel pour faire monter la tension encore d'un cran.
J'ai eu finalement beaucoup de chance ce jour la car les vagues était en fait très très clean et parfaites pour une première session. Bien que très grosses, jusqu'à 4 fois au-dessus de la tête (6 / 7 m), j'ai ridé avec succès plusieurs vagues sans trop bouffer...
La vague de Todos semble effrayante, faut-il être assez fou ou suicidaire pour oser y aller ?
Pas du tout.
Todos est une vague qui a un channel très profond, la vague est relativement prévisible, c'est pour cela que l'on peut la rider à cette taille, et bien plus gros (voir les célèbres sessions tow-in à plus de 60 pieds).
A partir du moment où l'on est extrêmement précis sur son placement, que l'on a la planche et la force de rame qu'il faut, le mental dit d'y aller sans hésiter, la vague est SURFABLE (contrairement à 5 m de houle sur une plage de Gironde qui a des centaines de mètres de barre à passer et un courant ingérable).
Personnellement, j'étais très en forme physiquement à l'époque, je donnais des cours de surf et je surfais quasi quotidiennement, je faisais beaucoup de bodysurf aussi. Je mangeais bien, et je ne buvais que modérément. J'étais accompagné d'amis expérimentés et j'avais déjà, en 2004, 19 ans de surf, et 5 ans de sauvetage derrière moi.
Lors de sessions comme celle-là, on peut choisir d'être extrêmement prudent, c'est à dire ne partir que sur les vagues que l'on juge sans surprise, se retirer dans le channel dès qu'on a un doute sur le placement, attendre qu'une série passe pour se replacer. En fonction de l'état d'esprit et de sa condition physique le jour J, on peut décider de prendre plus ou moins de risques : partir plus profond, plus late, offre davantage de sensations mais il faut être prêt à payer les conséquences d'une chute.
Les jours où il y a des équipes de tow-in et des jet ski présents, on a tendance à prendre plus de risque car on sait qu'en cas de problème un jet ski peut venir à notre secours et nous ramener au port en 30 minutes.
Que se passe-t-il sur une grosse vague ?
Le surf de grosses vagues est une histoire de précision. Il faut être précis sur son placement, son timing, et ses trajectoires. Il est fondamental de faire les bons choix de ligne. Pour mettre les choses en perspective, un drop à 20 pieds relativement à l'épaule suivit d'un kick-out quasi immédiat dans le channel équivaut à 150 mètres et 15 min de rame pour revenir au peack. Les proportions sont complètement différentes. On va beaucoup plus vite, et il n'est pas rare de couvrir une section de 30 mètres rien que sur un bottom-turn.
Le rush principal ressenti sur un gros drop est une sensation de chute libre, comme au départ d'une montagne russe. On ne contrôle plus grand chose pendant de longs dizièmes de secondes, et c'est cette sensation que recherchent les big wave riders. En général on se retrouve jambes tendues le coeur dans la cervelle et le moment magique est lors du replaquage au bottom.
Ça fait vraiment envie un récit comme celui là même si c'est clair que le surf sur des vagues de cette taille, ça ne s'improvise pas et j'imagine que le jour J il faut être ultra prêt... Physiquement et dans la tête