Oui, c'est sûr, "gros pour moi" n'est pas du tout la même chose que du surf de gros (objectivement parlant) !! Y'a pas photo, et pas l'ombre d'un doute une seule seconde !!
Y'a des barres de 2 mètres que je ne passe pas -elles sont peut-être même plus nombreuses que celles que je passe-, et ma plus grosse vague taillait 3 mètre.
Histoire de situer de là où je parle quoi...
Néanmoins le témoignage est gratifiant et encourageant, car j'y retrouve pas mal de mes réflexions et sensations: je m'y identifie totalement, même si c'est à mon échelle.
En fait je ne pense pas qu'il y ait véritablement une limite minimale objective au "gros surf", même si, objectivement, à partir d'un moment, c'est gros pour tout le monde et n'importe qui. (si si, cette phrase a un sens).
Intuitivement, je serais tenté de dire que le gabarit compte parmi les paramètres personnels qui entrent dans la subjectivité du surf de gros. C'est même assez évident.
Après, il y a le niveau en natation, je dirais. Et plus généralement l' "aisance dans l'eau", ce qui me paraît très difficilement quantifiable et qualifiable: il y a le fait d'être à l'aise dans l'élément physique liquide (bon nageur), mais aussi être à l'aise dans l'élément marin.
je sais pas si vous voyez ce que je veux dire.
Par contre qu'on soit capable de placer ou non des rollers de oufzor (donc la technique/niveau surf), je suis à peu près persuadé que ça ne rentre pas du tout en compte.
De plus, l'intérêt d'être baraqué me semble très relatif, si ce n'est très secondaire. "Pas de bras, pas de chocolat" c'est peut-être vrai pour passer une barre, m'enfin y'a toujours des reefs, des spots où il n'y a aucune lutte musculaire à livrer pour arriver au peak, si ce n'est un peu d'endurance et de patience... Pis surtout pour du vrai gros, où de toute façon, il n'y a aucune lutte livrable...
Ce qui me semble évident également, c'est le côté "tête brûlée" pour le dire diplomatiquement, c'est à dire le côté pathologique pour le dire plus crument. Et si le service marketing des marques de surf parle de repousser ses limites, ou d'un sport extrême, d'un autre point de vue, je ne pense pas qu'on soit si loin des pratiques auto-destructrices des aficionados de drogues... dures... extrêmes...
Si y'a un côté glamour du "fix d'adrénaline", y'a aussi la réalité bio-chimique de ce shoot.
Il y a quand même des parallèles assez troublants, qu'ils soient linguistiques, historiques, sociaux ou psychologiques.
Bref. C'est enfoncer une porte ouverte que de dire que le gros c'est relatif, mais je m'interrogeais justement sur ce qui influe sur cette subjectivité.
La vôtre est faite de quoi ?
Sinon, il y a des sensations que je n'ai pas retrouvé dans le topic: des sensations marines que je n'ai que quand je taquine du "gros pour moi". Euh, encore une fois, je suis bien persuadé que mes expériences si terribles (dans les 2 sens du terme) pour moi peuvent paraître dérisoires à bien d'autres...
Cela dit, quelque-soit le spot, dès que ça prend de la taille, le peak s'éloigne de la plage/falaise/dune. Et particulièrement, de mémoire, un jour de marée basse, sur un reef déjà à 15 minutes de rame en temps normal... très précisémment, j'avais l'impression d'être en haute-mer, au large. J'ai jamais fait de bateau, mais c'est précisément ce que je me suis dit/pensé/ressenti: " je suis en haute-mer". Et très étonnamment c'était une sensation très sereine, très calme, très paisible.
L'autre sensation ou plus exactement, l'autre "rapport" à l'océan et aux vagues, c'est que quand elles deviennent grosses, elles prennent vie. Littéralement, étymologiquement, elles s'
animent. Là je parle quand j'ai le cul bien calé sur ma planche, flottant au line-up au gré de la houle comme un petit bouchon de pêche.
'Fin je me dis pas que la première vague de la série du train de houle qui me passe dessous et me soulève puis m'abaisse s'appelle Simone, la seconde Nathalie, etc... Mais autant dans de petites conditions je ne vois que la résultante d'un phénomène physique très "minéral", autant dans des conditions plus généreuses et sérieuses, les vagues m'apparaissent plus comme l'expression d'un système globalement "animal".
Je ne sais pas si c'est du mysticisme, ou de la psychose, et à vrai dire je m'en bas le steack, toujours est-il que ma sensibilité m'empêche de ne rien y voir quand je ressens la poussé d'archimède d'un tel volume et d'une telle masse en mouvement.
C'est le truc naturel le plus gros de ma vie que j'ai vu en fait, quand j'ai pris ma vague de 3 mètres. Je n'ai pas pensé à être noyé, ou à me fracasser le crâne contre le reef... Take off, quasi direct de travers, et j'ai "vu" cette masse d'eau, cette masse tout court, cette énorme masse qui prenait forme sous mes yeux. "Je suis sur quoi, je suis sur qui, c'est quoi ce truc ?" que je me suis-dit.
Et quand je joue les bouchons de pêche au line up à attendre une bonne vague, en fait, des séries/vagues que je laisse filer, c'est leur masse que je ressens à être balloté ainsi. Et pareil que pour la "haute-mer", étonnamment, ça reste très calme et très paisible comme sensation.