par pipeau » Dim Mar 13, 2011 11:58
Ouakam, Ouakam, Ouakam... Mes amis n'avaient que ce nom en bouche. Loin d'avoir leur culture en matière de vague je ne comprenais pas l'importance de cette dernière à leurs yeux. Il a fallu donc que je me fasse expliquer que cette vague était je cite une « world class » et venait s'inscrire en deuxième position dans le top five des vagues africaines juste après Jeffrey's Bay, la première de ce continent. De toute façon tous les surfers du coin semblent obsédés par cette vague. Après s'être dit bonjour il est certain que la suite sera dévolue à Ouakam. Qu'elle ait marché ou pas on parle d'elle. Et c'est qu'elle semble capricieuse la bougre. Aimant se faire désirer, elle ne fonctionne qu'avec des conditions bien précises. Je vous avouerais que je n'ai pas très bien saisi ces dernières et le mystère restera entier pour moi.
Mes collègues surfers auront quant-à-eux la chance de voir leurs vœux s'exaucer; Occy me dira d'ailleurs « maintenant que j'ai Ouakam, le reste niveau surf, c'est du bonus ». Nous étions au troisième jour du trip...
La vague en elle même se situe en dessous des deux collines, nommée les Mamelles, dont la plus grande est le point culminant de la presqu'île du Cap Vert et accueille le phare dit "phare des Mamelles". Elle fait face à un village de pêcheur Lébous et sur la plage l'activité est rythmée par les va et vient incessants des nombreuses barques de pèche. Un vaste abri sans mur et en ciment semble être le marché aux poissons. Plus en retrait, un alignement de constructions, elles aussi en dur laisse deviner des habitations et des lieux où les pêcheurs entreposent leur matériel.
La plage chose rare sur cette côte est faite de sable. Étrangement quoique à l'image de Dakar dans un sens, pas un touriste ne vient d'ailleurs profiter de l'endroit. Par contre comme il se doit et comme vous vous y attendiez, les surfers y sont bien présents. Attention pas en horde et en nombre ahurissant, non, simplement dans la moyenne des autres spots. Une dizaine simultanément à l'eau. Du moins le jour où nous y étions et pourtant la vague c'était mise sur son 31 (si quelqu'un connait la source de cette expression MP merci). Bien sur les surf camps du coin, pas bêtes, y viennent ainsi que les pros en trip photos de sponsors. D'un côté faudrait être un sacré couillon de tenancier de surf camp pour ne pas permettre à ses surfers vacanciers de venir voir cette vague. Parfois je balance de ces trucs moi...
La vague, comment vous dire. Ben je ne l'ai pour ainsi dire peu vu. Nous y étions en plein après midi et le soleil alors à son zénith se reflétait en pleine face. Et malgré mes lunettes de soleil la luminosité était vraiment importante pour vraiment distinguer véritablement qui faisait quoi, pourquoi et comment. Photographe (a)mateur j'appuyais sur le déclencheur comme un épileptique en rupture de traitement dés qu'une ombre surgissait du plan d'eau. Oh bien sur j'ai vu la vague dérouler parfaitement mais de là à vous raconter les nombreux pièges qu'elle recèle, comprenez par là les nombreuses patates présentes et visibles de l'eau, mes compagnons vous les décriront parfaitement sans nul doute.
Par contre il m'a était offert un autre spectacle non moins intéressant... A l'extrême sud de la plage, là où le sable cède la place aux rochers un club de lutteurs sénégalais vient de manière habituelle s'entrainer. Bon par club il faut imaginez un endroit de la plage, tout simplement. Pas de baraque, pas de délimitation, juste une bande de sable de 20 mètres de longueur pour 5 de large. Là c'est le club. Bon ok les gars, c'est votre club après tout. Me voici donc encore assez fraichement débarqué de mon avion et par là même débarrassé pour un temps de l'hiver à quelques mètres de solides gaillards qui n'auront de cesse pendant deux heures de courir, faire des pompes, des pas chassés dans le sable, des renforcement de cuisses, des trucs de barges genre je cours à reculons en enfonçant bien bien les talons pour que ce soit plus dur et je fais cela pendant 30 mn. A aucun moment je n'ai entendu le moindre mot. Tous semblaient « obéir » aux claquements de mains du plus costauds. Bref un spectacle qui aurait de quoi faire tomber les quelques couguars en mal d'exotisme que l'on ne manque pas de croiser sur la côte. Une fois ce long « échauffement » terminé les voilà en train de s'entrainer de manière plus directe au combat. Bon, notez bien Messieurs qu’en cas de différend avec un sénégalais, l'extrême prudence serait de se renseigner sur ses connaissances dans l'art de la lutte sénégalaise. Ça va vite; très vite et c'est brutal. Je ne connaissais que de très loin cet art martial mais à la vue de cet entrainement je me suis renseigné :
La lutte est sans doute l'un des sports, avec le foot, le plus important du Sénégal. Il existe plusieurs catégories tout comme dans la boxe selon les poids des lutteurs mais celle des « lourds » semble la préférée ou du moins celle qui entraine le plus les passions. A la télévision l’annonce des principaux combats tourne en boucle et il existe une multitude d'émissions dédiées à ce sport de combat. Des affiches géantes sont aussi présentes sur les murs de la ville. Les lutteurs les plus connus, les plus réputés, peuvent combattre à peu près deux fois par an. Ces derniers peuvent à ces occasions gagner jusqu’à 150 000 euros voir 200 000 (tout comme la boxe de chez nous, ce sont les promoteurs de combats qui s'en mettent surtout pleins les fouilles). Pour info ou pour rappel, le salaire moyen au Sénégal est de 80 euros. Orange, qui est l’un des deux opérateurs téléphonique leader au Sénégal et dans le marché de la téléphonie est l’un des plus gros sponsors de ce sport. L’autre n’est autre que son concurrent direct, l'opérateur Tigo .
Vu de l’extérieur un combat du moins dans les minutes qui le précèdent passe à mes yeux pour quelque chose d’assez mystérieux. Les combattants arrivent au stade en voiture accompagné d’une foule en délire et surtout entouré de mecs aussi mastocs qu'eux. Jusque-là rien de bien différent avec notre boxe professionnelle. Mais quand le lutteur commence à s’asperger de lait, à piétiner certains objets posés devant lui au sol et que ses accompagnateurs de 120 kilos se lancent dans une chorégraphie rythmée digne d'un boys-band des années 80, je perds un peu pied… Il faut savoir que le lutteur est terriblement superstitieux et toutes ses choses étranges à mes yeux ne sont là que pour conjurer le mauvais sort et les mauvais esprits. C'est peut être là toute la force du Sénégal, qui « mélange », le terme est peut être mal choisi, disons qui sait vivre avec sa culture à elle basée sur une croyance religieuse mais sait aussi et vivre en parfaite harmonie avec des coutumes plus ancestrales. Tout le monde suit ? Je suis pas sur.... Ainsi lorsque l’un de ces sportif est passé au camp saluer Oumar, le lutteur portait des gants pour pas que l’on le touche directement. D’après ce que j’ai compris bon nombre de « rituels » et « superstitions » régissent la vie de ces sportifs.
Les règles sont simples en apparence: Le combat se termine lorsque la tête, les fesses ou le dos du lutteur touchent le sol ou qu'il a quatre appuis (deux mains et deux genoux) sur le sol. Ça c'est la théorie mais cela reviendrait à dire que le foot américain c'est simple, suffit de passer le ballon au fond du terrain de son adversaire. Oumar a bien tenté de m'expliquer quelques trucs mais bon le hors jeux en foot restant malgré les 10 000 explications de ma petite cousine de 10 ans ("qui kiffe grave la ligue une") un mystère j'ai laissé tombé. Lui aussi.
Bon bref, une fois de plus me voilà à côté de la plaque, j'avais pour mission de raconter une vague ... Après vous faites ce que vous voulez, j'ai aucun conseil à donner mais bon sang, Ouakamn, « world class » ou pas, ne se résume pas à une vague ! N'hésitez pas par exemple a aller voir juste devant la dernière maison au sud en retrait de la plage si la barque qui était en cours de fabrication est finie...