par lob » Lun Juin 07, 2010 17:39
C'est long, c'est le même texte qu'ailleurs (pas la peine de relire pour les ambiforumeux)
mon choix est dicté par des réalités économiques c'est une certitude mais pas uniquement et heureusement pour moi.
J'aurais pu décider de continuer encore et de me faire croire que ça pouvait évoluer, après tout pourquoi pas...
Mais une décision pareille est le fruit de longues réflexions plus vastes que le simple aspect économique.
D'abord, faut voir que je ne me sens pas aigri d'avoir fait un choix sans y être contraint.
C'est vraiment moi qui avait décidé de commencer, c'est moi qui avais donné la ligne directrice de mon job, c'est moi qui décide quand ça suffit.
Sur le plan personnel, il y a des moments ou la vie sans pouvoir anticiper à deux semaines près la charge de travail et compagnie, c'est pas si rigolo que ça.
A 25 ans, c'est jouable, à (presque presque) 40 c'est naze.
Ca fait aussi partie des raisons du choix.
Autre raison, l'enjeu intellectuel... je dis pas que faire des planches ce soit limité, je peux développer là dessus aussi... mais mon "vrai" métier m'a habitué à des projets plus riches malgré tout et c'est un aspect des choses qui manque un brin (la durée et la complexité).
Autre "fatigue", fournir des outils de loisir sans en avoir soi même: plus de voyages, plus de vacances, plus de week ends ou presque etc...
Ca rejoint la question du confort de vie au quotidien.
Encore une "fatigue": le temps et l'implication personnelle et affective: trop énorme en regard du chapitre suivant, le fameux "toute peine mérite salaire"... je me suis laissé prendre à passer un temps tel sur les planches, le site, le blog etc... que l'ensemble des opportunités de projets "valables" est passé à la trappe un à un.
et tout ça pour walou ou presque.
Maintenant, la grosse question des thunes, j'ai tout bien lu les avis des uns et des autres, il y a du vrai et du faux un peu partout...
je peux juste parler de mon propre cas pour affirmer que produire des planches, à mon échelle et à ma manière n'est pas rentable du tout.
J'ai pas trop de scrupules à parler de sous.
Donc, j'y vais.
Bilan comptable pour 2009 et pour ma gueule, en cumulant les activités archi et shape, je passe les détails sur les loyers, charges, sous traitance etc... il m'est resté 400€ par mois pour bosser 6 jours par semaine.
J'aime bien me taper sur les doigts mais pas plus que ça.
La vraie raison c'est que comme je l'ai dit, le temps passé sur les planches m'a tenu à l'écart de "vraies" missions rentables.
Or, je le savais pertinemment, faire les shapes c'est jouable seulement si on n'en n'a pas besoin pour vivre.
et basta.
Pasque oui, produire des planches ne rapporte quasi rien.
Mousse, dérives, glassing, loyers, assurances, charges (secu, csg, crds, retraites etc...), outilage, travaux d'entretien, tout ci tout ça, ça correspond en gros à une dépense de 500€ sur un prix de vente de 570 ou 590...
Et dégager 80€ par planche, c'est pas suffisant pour avancer le stock de matos utile, faire des planches de stock, envisager de bosser avec des shops dont le métier est de faire de la marge etc...
Alors pour moi même, qui ne suis pas particulièrement bénévole naturellement, c'est pas une bonne idée de continuer...
Pourtant, j'adore les contacts que j'ai créé dans ce temps, j'adore faire le shape et progresser vers de belles courbes et vers des planches toujours plus efficaces.
Mais bon, on vit dans un monde où tout doit avoir un prix.
Le mien n'est pas celui là, celui de ma vie de famille non plus.
Ce qui fait que je stoppe et que je reste admiratif de tous ceux qui par choix ou nécessité ou autre raison continuent de pratiquer ce job ingrat.
Je ne sais même pas si j'aurai un jour l'envie de reprendre, pour le moment la question ne se pose pas.
Mais comme je l'ai dit et comme je le pense, la profession de shapeur local est plus que menacée.
Même des gars en place depuis longtemps et avec une production conséquente sont en déséquilibre permanent.
Et comme ces gars sont conscient de ce que représente la dépense d'une planche pour la clientèle, ils gardent les prix au plus bas, quitte à crever la dalle et risquer de fermer à chaque semaine...
Ce qui mène effectivement à cette question très importante et dont j'ai parfaitement conscience: le prix de vente.
Pour le producteur, la marge est trop faible.
Pour l'acheteur, la somme à sortir est conséquente.
Ce qui mène à des tas de réflexions encore:
- la tendance hard discount généralisée dans laquelle le profit immédiat prend le pas sur la vision d'avenir
- la "concurrence" de produits manufacturés "ailleurs" peu chers et finalement pas si mal que ça
- le pouvoir d'achat de chacun d'entre nous
- etc....
Wala quoi, chacun verra midi à sa porte.
Pour ma part, je savais en commençant que je n'irais probablement pas chercher une retraite bien méritée le rabot à la main.
Mon envie était de produire des planches qui me faisaient tripper et que personne ne proposait, de bosser au mieux de mes capacités à chaque fois, d'apporter du service et de l'écoute, de faire du bon travail en somme.
Il me semble que j'ai pas si mal fait.
Il me semble aussi que je ne suis pas à 100% fait pour ça non plus.
Donc, "ça" se finit mais sans malheur, dans un choix clairement consenti.
Puis j'avoue aussi que retrouver une neutralité par rapport au surf en tant que monde et en tant qu'objet ça doit pas être si mal