Mercredi 21 Avril 2010, Arrondissement d’Ain Sebaa, Grand Casablanca, Maroc, Continent Africain… (J’aime bien commencé comme ça, ça donne d’avantage de dimension ! Bon ok c’est ridicule…)
25°C, un temps ensoleilé, quelque peu orageux, vent quasi nul, 17h30… Je viens de fermé mon PC avec ma journée de « travail » passé en grande partie ici sur le forum il faut l’admettre, et à scruter l’état de la mer… 1,6m annoncé à la bouée avec une houle de Sud Ouest de 13s à la série… je quitte l’univers climatisé et bruyant de la ligne de production pour me retrouver dans ma voiture resté en plein soleil toute la journée, en mode hammam avec l’humidité en moins…
Je parcours les 200m qui sépare mon lieu de travail de la plage, m’engage sur l’impasse qui mène au poste de secours encore inhabité à cette période de l’année et me retrouve sur le spot de chouanté.
Allez un peu de culture G, « chanté» (A prononcé avec l’accent du sud de la France un peu) en Darija (Dialecte Marocain) c’est le chemin. Et Chouanté (Gardez l’accent du sud) le petit chemin. Le spot s’appelle ainsi tout simplement parce qu’il y a cette petite impasse qui mène directement sur la plage. On m’avait parlé d’un autre nom pour ce spot, je ne me souviens que de la traduction en Français : Le bec de canard, à cause du Mirador du poste de secours qui domine la plage. Pour les arabophones qui me lirait, je ne suis pas certain de l’ortographe… smehlia…
Niveau cadre ce n’est pas le plus beau spot du monde… Face au pic, un chantier éternellement en cours étant donné que je n’y ai jamais vu personne… Sur la gauche le quartier industriel d’Ain Sebaa, quelques Douars, au loin Casablanca, le port et enfin la grande mosquée Hassan II. A droite la zone industrielle de Sidi Bernoussi qui s’arrête avant les dunes et les Cabanons de Palomas dominé encore plus loin par les usines de Mohammedia.
Au large, les immenses portes containers qui attendent de décharger leur cargaison au port de Casa.
A quelques centaines de mètre du rivage, il y a comme souvent ici sur la côte entre Rabat et Casa, une grosse barrière de rocher qui freine considérablement la houle. On la devine à marée haute en découvrant les barriques qui déroulent au large lors des fortes houles, et elle se dévoile carrément à marée basse où les vagues viennent se fracasser … Bref… insurfable… et c’est la raison pour laquelle le spot ici ne marche que de la mi-marée montante à marée haute. Cette barrière naturelle fait office un peu de filtre, et fait naître derrière elle un jolie Beach Break. Beach Break ? Plus ou moins, la marée haute rend invisible la multitude de patates disséminés de ça et la au fond de l’eau dont on aimerai mieux éviter le contact en cas de chute…
Bon je vous fais pas trop rêvé la ? Ok c’est vrai ça manque de palmiers, de cèdres géants et de dunes mais bon… je garde ça pour le weekend
Et enfin, en face, le pic de Chouanté, et une eau bleu presque turquoise aujourd’hui… On devine une houle un peu timide qui dessine des lignes parallèles les unes par rapport aux autres. 1m ? Ouai 1m en moyenne, des séries peut être plus grosses, d’autre plus petites, mais en moyenne un petit mètre. Le vent s’est légèrement levé ce qui rend le plan d’eau un petit peu clapoteux, ce qui n’empêche de voir une superbe gauche dérouler rapidement face à moi. 2 surfers à l’eau !
C’est bon ça !! Allez je ne perds pas de temps, remonte dans la voiture et avale le petit kilomètre qui me sépare de chez moi en quelques minutes. Voilà vous aurez compris le gros avantage de ce spot c’est qu’il est à 200m de mon lieu de travail et d’à peine 1km de chez moi, alors je ne vais pas me plaindre, pi j’ai trop faim, trop besoin de me remettre à l’eau !!
Bizarrement je ne l’ai encore jamais surfé, faut dire qu’en général je préfère pousser les bornes un poil plus loin pour trouver de meilleurs spots avec de meilleurs vagues, dans un meilleur cadre.
Arrivé chez moi, j’échange immédiatement ma blouse de travail contre ma combi, enfile un t-shirt et des sandales, et redescends les 4 étages avec le LB sous le bras que je glisserai directement dans la voiture. Pas question de se prendre la tête avec des sangles alors que 5min de voiture me sépare de la mise à l’eau. Quelques instant plus tard, retour à Chouanté et déjà prêt pour la mise à l’eau…
L’autre bonne nouvelle, c’est qu’en 1/4h, ça à légèrement forci, un peu plus pêchu, un tout petit peu plus gros. La mauvaise c’est que durant ma courte absence, le pic s’est popularisé. Une dizaine de personnes attendent sagement leur tour. Qu’à cela ne tienne, j’enfile le haut de la combi, laisse les sandales, sors le LB, ferme la voiture, et me dirige vers le rivage. Il est 17h50.
J’ai donc face à moi une belle gauche qui déroule assez rapidement, et qui à parfois tendance à creuser un peu profond. Je sais pas si le LB était la meilleure idée… Ah si y’a un mec qui en a un dans le fond. Allez ça part.
Atteindre le pic est relativement facile, il suffit de contourner la barre par la gauche pour se retrouver derrière sans trop d’effort.
Un « salam » ou un signe de tête à chaque fois que je croise quelqu’un et plein de grand sourire en retour. L’accueil n’est pas désagréable. J’avais un petit peu peur du localisme, il n’y a vraiment que les locaux d’Ain Sebaa qui surf ce spot… Vous me direz j’habite Ain Sebaa ?! Oui mais jusqu’ici ils n’avaient jamais vu ma trogne de franssaoui.
J’arrive au pic, le mec en longboard passe devant moi et s’offre un très jolie ride quasi jusqu’à la plage. Moi en attendant j’observe, les vagues, comment le spot fonctionne, et mes compagnons aussi. Je me fais un peu dévisagé du regard, faut dire que j’ai pas trop une tête de Marocain, je passe pas inaperçu… Mais aucune agressivité et plein de sourire autour de moi. Le gars au LB remonte au pic, je lui fait un signe de tête comme pour le féliciter de la très belle vague qu’il vient de prendre, il me réponds par un grand sourire tout en cachant légèrement sa fierté. Héhé il le sait qu’il a prit une belle vague
Question population il y a ce mec qui cartonne bien en LB, un autre qui envoi pas mal en shortboard mais plus près du bord. Les autres, de tout âge, le plus jeune doit avoir pas plus de 8ans, le plus vieux une quarantaine, le niveau n’est pas trop élevé. Du coup pas de baston au pic pour le départ. Ca m’arrange je suis pas trop bagarreur.
Ha je vous ai pas dit, le cadre est ‘achement plus sympa vu du pic. Certes le quartier indus’ n’est pas ce qu’il y a de plus attirant, mais la multitude de minarait que l’ont vois dépasser donne beaucoup de charme.
Le gars en LB repart, j’en profite pour prendre sa place au pic, et ma première occaz’ s’offre à moi. J’entends des cris, des mains qui claquent, des « yallah yallah yallah » plus des trucs que je comprends pas… ? Qu’est ce qu’il se passe ? Tout simplement à chaque fois que quelqu’un s’apprête à prendre une vague, tout le monde l’encourage sans exception, et j’y ai droit moi aussi ! Ca fait juste trop plaisirs et chaud au cœur !
Je suis toujours aussi surpris de la facilité avec laquelle la board part. Ca pousse, take off, je suis parti en biais pour éviter un bottom turn trop appuyé que j’aurai vraisemblablement loupé, et me voilà bien calé à l’inside et filant droit. La lèvre s’abat sur mon tail, je fais quelques maladroits pas en avant pour remettre la planche bien à plat et gagner de la vitesse. Fuuuiiit ça file ça file, à tel point que j’ai comme l’impression d’aller « plus vite que la vague » (Je sais c’est pas possible) du coup refait quelques pas en arrière envoi lentement à droite pour me retrouver d’avantage dans le creux, regagne un peu de vitesse, renvoi lentement à gauche pour tenter de me caler et … passe lentement de l’autre côté de la lèvre… J’ai de l’eau jusqu’à la taille à peine, pouaaaah je viens de me faire un run d’une 50taine de mètre !! GE-NIAL !!
Du coup je suis remonté à bloc, retourne au pic en deux coups de rames, échanges encore de grands sourires, et des pouces levés pour me féliciter de mon ride, l’ambiance est génialissime !
Toujours un peu timide, je ne me place pas totalement au pic, légèrement à l’écart. Le gars en LB me fait signe de m’approcher. Bon je le rejoins. Un gars d’une 20taine d’années je pense, bien costaud, il commence à me parler en arabe, mes humbles notions me font juste comprendre qu’ils parlent de vagues, mais quoi au juste. Il devine vite mon désarrois, et enchaîne en Français : « T’es pas Marocain ? Ha j’ai cru ! C’est la première fois que tu viens ici on t’a jamais vu ! Restes avec moi, c’est ici que le pic est le mieux ! » Waah je ne doutais pas de la gentillesse des Marocains et leur accueil, mais la dans l’eau sur le pic, force est d’admettre que je m’attendais pas à ça.
« Moi c’est Hatim, je suis du quartier, j’habite Ain Sebaa » On fait rapidement connaissance, je lui explique ce que je fais ici, d’où je viens, ou j’habite, Ain Sebaa également, bref on sympathise, le gars est juste adorable. Il m’explique qu’il a une asso de surf, « La vague bleue » et que je suis encore une fois le bienvenu.
Siii bon !!
Ha la série arrive, chacun à sa place. On laisse passer la première, la seconde sera pour lui, la troisième pour moi. Forcicement de la houle, ça creuse un peu plus que la précédente, me fait surprendre au take off, prends un étrange ascenseur, la nose vient frapper brutalement, le creux dans un « PAF » qui fait froid dans le dos, je me retrouve envoyer en orbite avant d’être rattraper par la lèvre qui s’abattra directement sur moi. Un bon wipe out qui fait mal… J’ai la cheville et le dos de la mains droite ultra douloureux… Le temps de reprendre mon souffle et remettre les idées en place, je suis intimement convaincu que j’ai cassé ma planche vu le bruit qu’elle a fait en frappant l’eau. Tire sur le leash et … Ouf elle n’a rien. Pour ma main et ma cheville, je ne sais pas trop ce qui s’est passé, mais ça passera dans la soirée et ça ne m’empêchera pas de continuer à profiter pleinement des vagues.
Retour à nouveau au pic. Ca rigole, ça chante, ça s’encourage, belle ambiance. Le vent tombe légèrement, le plan d’eau se « glassifit » par moment, quoi qu’un léger clapot subsiste.
Une nouvelle occaz’ s’offre à moi, je tente de partir à droite, take off, tente de mettre tout mon poids sur l’arrière pour faire touner le paquebot, celle-ci creuse vraiment d’avantage, je me retrouve bien calé dans le creux mais c’est toute la section qui me ferme sur la tronche. La sanction est la…
Bon retour au pic, Hatim me fait à nouveau signe. Je le rejoint, il me donne deux trois conseils sur le placement sur le LB, mais avec beaucoup d’humilité, et me suggère également de partir à gauche, les droites ferment systématiquement… Ha bah oui je m’en suis bien rendu compte…
Alors retour sur les gauches, quelques très beaux échecs, mais aussi de très beaux rident (A mon niveau biensur) qui m’emmène bien souvent jusqu’au bord de l’eau, je tombe vraiment accroc au LB. Un truc étrange tiens. Un take off loupé, une belle chute, et je sens quelque chose s’enrouler autour de mon index droit puis tiré super violemment. J’ai la sensation de me faire essorer l’index, et comme l’impression que si je ne l’avais pas contracté il sera au fond de l’eau à l’heure qu’il est… Etrange, mon leash s’est enroulé autour du doigt, emmener par le poid et la puissance de vague. J’ai récupérer un index écarlate, comme si le sang était sorti par les pores de la peau. Super douloureux…
L’éclairage autour de nous prends des couleurs orangés, le soleil derrière le pic, décline lentement. A l’inverse Casa à gauche commence à s’illuminer.
Le soleil disparaît enfin, mais toujours autant de monde à l’eau. J’enchainerai une bonne dizaine de vagues, plus ou moins belles, plus ou moins réussis. Il commence à faire sombre, il reste plus qu’un allo rougeâtre à l’endroit où le soleil à disparu. J’ai aucune idée de l’heure, mais mes bras et mes jambes me disent qu’il est temps de rentrer.
Je dis aurevoir à Hatim et aux autres de la main, on se recroisera c’est certain.
Pas question de partir sans prendre une vague, j’attends la série, laisse passer la première, me motive pour la seconde. La série est un tout petit peu balaise que les précédentes, je râme en biais, ça pousse encore, ça part, take off, je réussi un bottom turn en bas avant de me câler bien dans le creux et filer droit. Je perds un peu de vitesse, un pas en avant, puis deux, je me retrouve accroupi sur ma jambe arrière, avec la jambe avant ultra tendu, continu à filer à cette allure. Refait quelques pas en arrière, part légèrement à gauche pour me recaler à l’inside, retente quelques pas en avant et reprends la même position. Je file je file je file jusqu’à ce que la vague se laisse mourrire sur le rivage, j’ai de l’eau à mis cuisse. Je viens de prendre ma plus belle vague de la session !
Il fait presque nuit, je retourne à ma voiture, que j’avais laissé ouverte… Bravo… Rien à disparu heureusement. Je glisse le longboard dans la voiture, jette ma serviette sur le siège conducteur pour ne pas le mouiller. Je garde la combi, je l’enlèverai sous la douche à la maison. Toutes la ville est encensé par l’appel à la prière qui raisonne à chaque coin de rue rendant la scène un peu mystique.
20h je rentre chez moi avec un énorme smile collé au visage, de belles vagues, dans une super ambiance, tout prêt de la maison, une session de 2H jusqu’au couché du soleil. Parfait !
Bon une fois n’est pas coutume j’avais oublié l’appareil photo chez moi… Donc pas de photos, je vous laisse faire travailler votre imagination. Mais J’ai une caméro GoPro qui arrive ce weekend, mes prochains reports seront donc, inchallah illustré avec des images… embarqués !!
Nico