La récente multiplication des caméras aquatiques fait que chacun d’entre nous peut se filmer ou capturer la vague magique d’un camarade de session. Les plus doués verront grâce à un bon montage et un choix musical judicieux leurs efforts récompensés par une vidéo souvenir de qualitée. Ainsi les sites tels que Youtube et autres s’enrichissent chaque jour de tels films relatant tout un trip ou une plus simple session. Notre forum héberge d’ailleurs de plus en plus ce genre de vidéos qui met en images notre sens du partage d’une même passion. Mais ne nous trompons pas, lorsque on s’attaque au film professionnel de surf nous basculons dans un tout autre univers. L’approximation n’est plus de mise et l’attente du public doit être, que ce soit en qualité d’image, de vagues et bien sûr de surfers, comblée et ce sur toute la longueur du film. Aujourd’hui nous vous proposons une rencontre avec Lionel Sarran qui au fil des années et de travail a su se faire un nom dans le monde du surf et en particulier dans celui plus spécifique et méconnu qu’est le film de surf.
Surfrepotes: Pour commencer je te propose une présentation rapide.
J’ai 40 ans, Je fais des films depuis 14 ans maintenant. J’ai travaillé sur diverses productions telles que la nuit de la glisse, the search en russie, des pubs, diverses productions télé et sur des projets persos comme « liquid dvd ».
Je surfe depuis 24 ans, normal foot, ma planche préféré est une 6' très plate, je vais généralement surfer en vélo même en plein hiver même si tu as l'impression de perdre tes doigts sous la douche...
SRP: En dehors de celles imprimées sur la pellicule, on doit avoir pas mal d’images magiques en tête au retour de ce genre de trips.
Oui bien sur, il y a pas mal d'anecdotes, comme une à St Barth où je plonge, me glisse sous la vague, me retourne et là lorsque le surfeur passe en transparence. Je regarde sans filmer tellement j'étais bien et l'instant beau, mais heureusement en principe je filme quand même. Une autre fois, à Tahapuna avec Kevin Jonhson. Ce dernier fait un air. Je me retrouve sous l'eau, seule la camera était à la surface et il atterrit dessus. L'image devait être sympa mais je ne l'ai jamais vu, car après le développement je n'ai pas vu les rushs, seulement le film fini. Quant à la partie du tournage classique, c'est la rencontre avec les gens qui laisse le plus d'images comme dans tous types de voyage d'ailleurs.
SRP: Tu sembles apprécier la bonne vieille pellicule et son rendue. D’un autre côté l’explosion de la vidéo et de son matériel a engendré toute une nouvelle génération de vidéastes aquatiques. Ainsi la pellicule, même dans de grosses productions, laisse souvent la place aux pixels. Quel regard portes tu sur cet état de fait.
Avec la pellicule, les images ont vraiment un plus dans la sensation qu'elles procurent et en plus étant donner que l'on peut tourner plus facilement à haute vitesse les ralentis sont sublimes. Mais c'est plus contraignant à utiliser. La vidéo fait actuellement de grands pas en avant. De plus, avec l'apparition de nouvelle technologie, le rendu se rapproche de plus en plus de la pellicule. Et surtout le fait de filmer ne coûte plus beaucoup d'argent, alors qu'en super 16 entre l'achat de la pellicule, son développement et le télécinéma, le fait juste de filmer coûte un œil. C’est bien dommage d'ailleurs, il faut vraiment avoir de bons budgets pour ça. Mais si je pouvais choisir, mon cœur se tourne vers l'argentique même si le stress d'attendre le développement est toujours important.
SRP: Et sur cette nouvelle génération de cinéastes ?
Là je n'ai pas grand chose à dire, faire des films est une forme d'expression, chacun fait ce qu'il ressent dans le moment ou il réalise son film. Ensuite c'est comme pour tout, certains sont très bons d'autres moins.
Pour en avoir rencontrer quelques uns de ces vidéastes, il existe une certaine amertume latente ou parfois plus franche dans leurs propos. Ce n’est pas si facile de vivre de sa passion, non ?
C'est très compréhensible. C’est difficile de trouver des budgets pour pouvoir s'exprimer, d'autant qu'à ce niveau le travail que l'on fournit est très souvent dévalorisé quand on sait le temps et l'investissement qu'il faut pour faire un film et que parfois on vous compare ça à un simple article, ou à une photo. Je n'ai rien contre ce métier bien au contraire,mais un film doit correspondre à 800 photos peut être qui doivent toutes être réussies, assemblées, harmonisées...Alors qu'un article est lui fait en quelques heures, alors que de votre coté vous avez 6 mois de travail plein, c'est un peu dur...
SRP: Un film n’est pas qu’une succession d’images, aussi belles soient elles. C’est avant tout une histoire mise en image… Peux tu nous donner ta conception d’un film de surf ?
Dans les films de surf il y a de tout, des films où tout est organisé autour de l'action. Il y’a aussi des documentaires, des fictions, mais avec l'arrivée de la vidéo est arrivée la consommation de beaucoup d'images, du coup on veut produire plus donc plus vite... et du coup baisse de la créativité... Les premiers films de surf étaient tous tournés en pellicule du coup c'était une approche plus cinématographique, mais on y revient je pense...
De mon coté j'ai réalisé pas mal de films tourné vers l'action, mais là j'ai le sentiment d'avoir fait le tour de ça, le film que je viens de terminer est plus travaillé que dans le passé, et mon prochain projet, sera en grande partie scénarisé, il me tarde...
SRP: Un film en termes de temps, de matériel et de budget cela représente quoi au fait ?
Niveau du budget c'est très variable, certains coûtent de l'argent d'autres non et pour le temps c'est pareil ça dépend de ce que l'on veut faire, mais c'est systématiquement plusieurs mois de travail, ça peut aussi s'étendre sur des années, et le matériel dépend du reste, mais le rêve est de tourner comme d'autres productions de cinéma et là c'est très cher, du monde, du matériel et du temps...
SRP: Justement tu es en train de finir la post-production de ton dernier film. Tu peux nous en dire plus ?
C'est exact il s'appelle « les amis de la plage ». L'idée du film est d'évoquer le lien qu'il y a entre les surfers lors d'une année, pendants la belle saison en France, jusqu'au départ en voyage, et le lien qu'il y a entre eux par le biais des communication divers, ce qui me permet de passer d'une séquence et d'un lieux à l'autre. J'ai tout tourné sur mes propres deniers, sans budget, donc ce n'est pas tout à fait le film que je voulais faire, mais le résultat me plait bien, je suis en train de le tester avec diverses personnes, pour l'instant les réactions sont bonnes, il sera très prochainement disponible. J'espère que ce film me permettra de trouver un financement pour le suivant...
SRP: Comme tu viens de nous le dire, ce film fait partie d’un projet en cours : Des projections en plein air sur des spots ou au sein de localités surfiques.
Oui, c'est un projet que j'ai depuis très longtemps, c'est une tournée de projection de films sur les plages avec un écran gonflable de 10m/7m, c'est une animation gratuite bien sur, ça avance, mais il faut trouver le financement et ça ce n'ai pas évident, alors que ça ne peut pas ne pas fonctionner, car les vacancier sont en attente de ce genre d'animation... D'ailleurs pour me faire un peu de pub vous pouvez rejoindre le groupe sur facebook, ça peut aider à trouver les partenaires nécessaires, parlez en... merci... pour plus d'infos il y a aussi un site qui explique le projet.
http://www.projectiondefilmdesurfsurlaplage.fr/
SRP: Pourtant, pour en avoir déjà discuter avec toi, tu sembles rencontrer de temps en temps des difficultés auprès de certaines d’entre elles. N’est ce pas paradoxal de profiter d’une économie sans vouloir vraiment la développer ?
C'est certain, mais dans l'ensemble, j'ai été bien accueilli, mais certaines communes voient encore ce sport comme une activité marginale, alors que c'est un vrai phénomène de société, et que sincèrement c'est une pratique merveilleuse et très saine, et qui l'air de rien a beaucoup apporté à beaucoup de stations balnéaires.
SRP: Ton autre passion est le shape. Depuis combien de temps t’adonnes tu à cette addiction ?
Depuis 22 ans environs, je m'y suis mit très vite après avoir commencé à surfer, c'est un vrai plaisir de surfer avec des planches que l'on a fabriqué soit même, de plus maintenant je sais vraiment ce qu'il me plait.
SRP: Ainsi, ton quiver est il fait uniquement de planches sorties de ton atelier ?
Non, ma grande planche, je l'ai ramené d'Hawaï, une Arakawa, je manque de dextérité pour les planches un peut plus grandes et plus à Lacanau on les surfe très rarement, mais pour les 6' je surfe des planches très plates, là je me régale...
SRP: Tu es ce qu’on peut appeler un local de Lacanau. Tu sembles véritablement attaché à ce lieu.
Oui j'y habite, mais je suis Bordelais à la base. On y est bien, il y a hors saison beaucoup mois de monde à l'eau qu'a Hossegor par exemple, ouf...Mais j'ai faillit y passer moins de temps cette année, mais ça c'est un choix d'ordre privé, on verra ce que l'avenir me réservera...
SRP: Justement, vivre loin de la fourmilière surfique Landaise n’est il pas un désavantage ou au contraire une force dans ta profession ?
Complètement, mais c'est un choix...
SRP: Tu sembles faire parti de ces personnes avec devant eux toujours deux ou trois projets. Je me trompe ?
Non, c'est tout le temps, j'imagine tout le temps de nouvelles choses, ensuite il faut réussir à les concrétiser, et là ça se corse, d'autant que je suis vite un peu trop gentil je crois, mais je suis têtu comme une mule...Faire des films donne une grande liberté à son imagination.
SRP: Je te remercie et te laisse le mot de la fin.
Je vous donne rendez vous pour visionner mon prochain film, penser à être respectueux des gens qui sont déjà là quand vous arrivez sur un spot, ils vous le rendront bien. Et d'aller jusqu'aux bout de vos envies...
Tout en vivant l'instant présent...Et plein de bonnes choses...
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