MUNDAKAMundaka est un petit village de pêcheur placé sur le site d'Urdaibai, classé réserve naturelle par l'Unesco. Une église, un fronton de pelote basque se dessinent sur la mer. Mais le clou est en contrebas, sur l'estuaire, où la rivière Oka vient à la rencontre de la mer et dessine, par le jeu des courants, un banc de sable parfait. C'est là, à marée basse, quand souffle un vent de sud-ouest, que la houle de l'Atlantique vient buter plein pot, s'enroulant sur elle-même, et offre un tube idéal qui file sur près de 300 m vers la gauche. Pour un surfeur, Mundaka, c'est le petit Jésus en culotte de velours. Gary Elkerton, ancienne gloire deux fois vice-champion du monde, dit : «Je l'ai déjà surfé à cinq mètres, je la place dans mon top trois des plus belles vagues du monde.» Elkerton est venu surfer ici au début des années 80, comme pas mal d'Australiens qui découvraient les côtes atlantiques européennes.
Depuis, la vague attire les riders du monde entier, qui tentent de grappiller quelques vagues aux surfeurs locaux à la réputation malcommode. «Comme tous les Landais, j'ai déjà fait cinq heures de voiture aller-retour dans l'espoir de prendre une seule vague. C'est un truc initiatique», dit Didier Piter, coach de l'équipe de France de surf. En 1999, Mundaka est devenu une étape du prestigieux WCT. Chaque année, pendant une dizaine de jours en octobre, les banderoles du sponsor organisateur se mêlent sur le port à celle des indépendantistes basques, qui profitent du focus médiatique pour s'afficher dans les grandes largeurs. La tradition veut que le vainqueur, coiffé d'un couvre-chef local, soit balancé dans le port par quelques gaillards du cru. Les hôtels tournent, les cafés tournent. Tout le monde est ravi. «Mundaka, c'est notre tour Eiffel», dit Marco Gannotti, tenancier du Mundaka Hotel depuis dix ans. Et puis un jour, la tour Eiffel s'est cassé la gueule.
En 2004, la vague a commencé à s'enrayer. «Elle était moins longue, moins régulière, et surtout, elle avait perdu son liant, c'était trois sections disjointes au lieu d'une», se souvient Didier Piter. En 2005, l'ASP, l'autorité mondiale du surf, livre son verdict infamant : «La vague n'a plus la classe mondiale.» L'épreuve WCT fut annulée. La rumeur a couru le monde du surf que la vague d'Euskadi s'était éteinte... Les cafés, hôtels et le surf shop du coin ont plongé. «On a cru qu'elle ne reviendrait jamais», dit François Liets, un habitué du spot. Les commerçants et les responsables de l'école de surf se sont regroupés dans une association «Zain du Mundaka !» (Sauver Mundaka ! ) Une pétition poussa le gouvernement basque autonome à financer une étude, confiée à l'université du Pays basque. Elle révéla que Mundaka n'était pas morte de mort naturelle : le dragage de la rivière, les années précédentes, avait modifié le sens du courant qui est venu taper frontalement le banc de sable, détruisant l'obstacle naturel contre lequel la vague venait se former. Mais au moment où les surfeurs maudissaient la main de l'homme, Mundaka a progressivement retrouvé du souffle. Le banc de sable s'est reconstitué... tout seul, selon les conclusions de l'étude. Au terme d'une surveillance pointilleuse, l'ASP a décidé de réinscrire Mundaka comme étape du WCT. Il apparaît même que le slogan tapageur de l'édition 2006 : «Elle revient, et elle est en colère» («She's back, she's angry») n'est pas qu'un argument marketing.
Petite video de Tom Curren, Taylor Knox, Rob Machado et Taj Burrow a Mundaka
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