Je l'avoue, ce n'est que très récemment et via le forum que j'ai découvert que l'on surfait au Canada. Et bien même. Mais c'est en discutant avec l'équipe d'UWL que j'ai découvert qu'il y' avait même des shapers dans cette partie du monde ! Louis Robert, fondateur du label ADDICTION est en effet natif de cette terre à la fois éloignée mais cousine par son histoire à la notre. Ce qui tombe assez bien vu le niveau de mon anglais. C'est donc dans un parfait français teinté de quelques expressions bien locales que Louis a répondu à mes questions. Et il y'en a car le parcours de shaper est fait de rencontres et de voyages...
Surfrepotes: En premier lieu, un petit rituel bien à nous: une présentation express.
Louis-philippe Robert, Surfboards shaper et entrepreneur immobilier. Je shape depuis 15 ans. J'ai 35 ans.
SRP: Te revoilà donc pour quelques jours sur nos terres et plus particulièrement chez UWL...
Très Heureux de revenir en France, La France est un pays très spécial pour moi et j'ai de très bons copains que j'ai hâte de revoir. Uwl m'a accepté comme un membre de leur famille lors de ma venue et je n'oublierai jamais cette expérience.
SRP: Ton histoire de shaper commence au tout début par le skate, le snowboard. Peux tu nous raconter les tout débuts d'Addiction avant le surf ?
J'ai commencé Addiction avec un pote, Dany Guillemette, quand on était aux lycée. Nous avions décidé de fabriquer quelques planches de snowboard et de faire le SIA trade show à LasVegas. Nous sommes revenus avec 500 commandes, nous avons donc décidé de faire la production en Suède chez Ride. Addiction Snowboard a duré 3 ans où en tout nus avons vendu 3000 planches, le skate était une petite partie de la compagnie, on pressait les planches localement. Nous avons ensuite vendu la compagnie lors du nowboard boom en 1997 à un investisseur Japonais ce qui m'a donné la possibilité de déménager du Quebec pour la Colombie Britannique où j'ai découvert le surf et la production de planche de surf.
SRP: Et là, près de Vancouver c'est la découverte du surf, non plus sur la neige mais bel et bien sur l'eau. Une véritable révélation ?
Véritable révélation ça c'est clair ! j'ai vécu dans le petit village de surf Tofino. 1000 habitants à l'époque et du super surf. Très hippie comme village, j'habitais dans mon VW 1974 et je shapais dans un garage, c'était très années 70 comme vibe, on fumait et expérimentais avec des designs très futuristes. J'ai surfé tous les jours à raison de 2 fois par jours, je ne travaillais pas: surf, surf et shape.
SRP: Si tu devais définir le surf, quels mots choisirais tu ?
Freedom
SRP: Cette ville a beau se situer à l'ouest du continent nord américain, elle est aussi très au nord de ce dernier. J'imagine que les conditions doivent être assez dure au niveau du surf.
Les conditions sont très froides, beaucoup de bons breaks sont accessibles que par bateau. Il y aussi beaucoup de plages à proximité, c'est un paradis dans son genre . Il y beaucoup de wild life: baleines, orques, lions de mer et porpoises * , c'est très beau, paradisiaque pour l'amoureux de la nature. Les arbres sont géants, c'est une cote très dramatique.
*marsouins
SRP: Après cette découverte de simple pratiquant tu passes de l'autre côté de la barrière avec une première expérience de shape au Mexique si j'ai bien compris...
Le Mexique a été un révélation pour moi parce-que je shapais pas encore de façon professionnelle donc commerciale. Je suis descendu avec ma VW 74 dans le Baja et j'ai campé à Punta Canejos où j'ai rencontré un surfer qui surfait un fish de Steve Lis dans du 2 mètres et il rippait! Pendant 2 mois, On a examiné la planche, surfé 5 ou 6 heures par jour et parlé design autour du feux. Nous n'avons pas shapé, nous avons juste surfé! Je suis tombé amoureux des pointes mexicaines et des surfboards californiens!
Steve Lis and Fish kneeboard, 1972.
SRP: Et c'est après que tu te lances dans le label Addiction.
Addiction était un label très limite au Canada. Au peak, je faisais 300 planches/année. Juste du custom et juste du wild! channels, fishes , crazy boards!
SRP: En 2005 tu rejoins les ateliers d'UWL pour une année, pourquoi ce choix ?
En fait je crois être rester 2 ans... humm j'me souviens plus... Anyway, j'ai contacté Uwl parce-que j'ai vu leur site, les planches étaient modernes, l'atelier était super moderne et Renaud, Carol et Thomas était aussi passionnés que moi, et ca a clique! Je voulais vivre en France et surfer les beach break français et prendre un café sur une terrasse après la session. Au Canada, après la session on fait un feu sur la plage et on regarde les ours se promener (no Joke)... Très diffèrent comme trip. La France est une terre spéciale, C'est le luxe, les barrels, le vins... qui ne voudrait pas vivre ca ?
SRP: Puis c'est le retour en terre natale. L'appel du pays a donc été plus fort que tout ?
En fait le retour était un peu dramatique parce-que je voulais vraiment vivre ma vie en France... Il y a plusieurs raisons à mon départ de France... Quand je suis partie du Canada pour venir en France, j'ai laissé ma copine de 5 ans, 2 chiens et j'ai vendu ma maison. Déjà là c'était pas une décision facile. Ma copine avait sa carrière au Canada donc une relation longue distance n'est pas la chose la plus facile... La deuxième raison c'est que j'ai jamais vraiment travaillé pour personne avant Uwl. J'ai toujours été mon propre patron donc travailler pour quelqu'un d'autre était aussi un ajustement, l'horaire à Uwl est de 8am a 6pm... Pas beaucoup de temps pour le surf et le surf pour moi était une priorité que j'ai complètement perdu en France. La troisième raison et la plus importante est que devenir un immigrant à 30 ans n'est pas simple. Mon crédit Canadiens ne valait rien en France, il fallait recommencer a zéro, donc impossible d'emprunter pour acheter une maison ou un appart....Quand le banquier ma refusé j'ai perdu mon cool et en même temps ma copine est venue me visiter et a « réallumer » la flamme... J'ai complètement disjoncté et j'ai décidé de revenir au Canada.. Je m'ennuie de la France et des fois je regrette mon choix, tout le monde a des démons et moi c'est un de mes plus gros.. J'aimerais beaucoup revenir y vivre et c'est un peut pour ça que j'y reviens.. Je veux convaincre ma fiancée !
SRP: Pour être clair, UWL a garder le nom d'Addiction surfboards. Cela n'a pas été trop difficile de se séparer de cette partie d'histoire de ta vie ?
Oui, très difficile. Addiction était mon bébé, mais maintenant j'ai commence un nouveaux Label, Revolution Surf. J'ai pu laissé Addiction pour la seule raison que l'entreprise est en très bonne main et c'était la meilleur décision pour garder mon nom en France jusqu'à mon retour un jour...
SRP: Et existe t'il beaucoup de shapers canadiens ?
Il y en a une vingtaine à peu près, l'industrie grossit beaucoup ici. La compétition est accrue. J'ai une bonne place dans l'industrie, donc pas de soucis pour moi!
SRP: Par contre j'ai pu lire dans une de tes interviews que ton pays faisait, comme beaucoup d'autres, face aux importations asiatiques.
En fait, de moins en moins. Les gens commencent a être éduqué sur la différence et les boards chinoises sont tellement génériques que personne n'en veut ici. Il y toujours un peux de surftech mais ce n'est pas vraiment un problème, ils ont leur place pour les shops de location.
SRP: Au delà de l'impact économique que cela peut représenter pour ta profession, étant toi même un amateur des surfs façon old school l'arrivée de tels produits doit particulièrement te toucher.
J'aime beaucoup le old school mais en vérité c'est que je shape beaucoup plus de shortboards modernes et des fish modernes que du old school. J'aime la combinaison du vieux et du nouveau. La raison pourquoi en France Addiction est devenue plutôt old school est que l'atelier Uwl fabriquais déjà quelques labels performances comme T&C et Sharp Eyes donc au début j'ai pris une direction old school pour être diffèrent et me faire remarquer , ca a viré en délire de planches magiques, un mariage de fish old school avec des bottoms de shortboards. On a vraiment réussit a rendre le fish à un nouveaux niveau, c'était une époque très excitante pour moi à Uwl parce que Renaud est un maniaque de la perfection, avec son aide, on a tous les deux créait quelque chose de nouveaux à l'époque. Maintenant Addiction est le leader en planche classique et le team Uwl a travailler très fort pour avoir cette position en France. Les chinois ne peuvent pas toucher la qualité des planches que Addiction produit et on a aucun problème avec l'importation asiatique, en vrai on y pense même pas... Je connais personne qui surf du chinois.
SRP: Cet « amour » pour l'authentique ne vient il pas de ton expérience californienne ?
Mon Amour du old School vient d'un Californien avec qui j'ai shapé 6 mois avant que j'arrive à UWL pour la première fois. Son nom est Matt Willis, on a shapé une série de fishs et longboards complètement "out of this world"! Des planche excentrique basées sur les twin fins. Après, je n'ai shapé que des fishs pendant 2 ans ! ...Complètement obsédé par le style. Tellement sexy comme planche... Matt Willis était reconnue pour son rocket fish, il travaillait pour Clyde Beattty, le père et master du surfboard en eps/ epoxy. ca a été une session de shape incroyable et une des plus importante de ma carrière.
SRP: Le label Addiction n'est pas qu'une simple déclinaison de différents shapes. Les décorations y ont toutes leurs importances. Dés le début cet aspect de la marque a t'il été défini?
J'ai toujours eu une influence par les hot rod, flame et pinstripe mais le grand changement a été a l'arrive en France, Thomas Cardinal est un génie en déco et Antoine (le glasseur) est un génie en résine teintée... Avec une équipe comme cela les planches sortent comme des bijoux. Uwl était beaucoup plus avancé que moi en glasse, ils ont vraiment upgrader Addiction au niveau gloss et deco.
SRP: Dans ton propre atelier, qu'elles sont les planches que tu préfères réaliser ?
Je shape des fishs modernes, shortboards modernes. Le concept « futuriste » est ma passion. Je suis très influencé par le concept de compsand, carbone, bamboo... les trucs dans le genre. J'aime l'expérimentation et j'essaie de pas me prendre trop aux sérieux et sortir de l'ordinaire.J'adore les nouveaux concepts et ouvrir les horizons pour des planches de meilleures qualités. Je travaille beaucoup sur mon nouveaux concept d'ailerons, je ne peux pas vraiment expliqué en ce moment... top secret stuff...
SRP: Chez toi aussi, existe t'il des phénomènes de modes sur certains shapes comme on peut le voir assez régulièrement chez nous ?
Oui c'est sur, les gens aiment les trends et la mode mais ici les gens pensent que n'importe quoi qui sort de chez Al Merrick est le meilleur. La compagnie avec la plus de pub gagne la course chez moi...lots of posers. Si Kelly surf cette planche, ils la veulent ! Je ne dit pas que Merrick n'est pas bon mais tout le monde a des idées différentes, souvent les meilleures découvertes sortent des petits shapers hungry pour l'expérimentation. J'aime la petite production pour cette aspect.
SRP: On parle de planches mais nous n'avons pas parlé des tiennes. Qu'elles sont les surfs qui constituent ton quiver ?
Fish 5'8 twin. 6'0 diamond tail shortboard, fish 6'2'', 7'2 hull et classic longboards. Deux de mes planches ont été shape par Renaud Cardinal, il est définitivement mon shaper favoris et 'aimerais me faire faire quelques planches de plus, son style est très clean, les lignes sont fluides et les rails fonctionnent parfaitement pour moi. Tout les shapers ont un style diffèrent et j'aime beaucoup le sien. J'ai shapé avec plusieurs shapers et je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi attentif et précis que Renaud, putain qu'il me fait chier des fois... le mec est fort. Je peux dire que mes shapes sont fortement influencés par Uwl.
SRP: Beaucoup de shapers regrettent le manque de temps pour profiter pleinement de belles sessions. Fais tu parti de ces derniers ou arrives tu à concilier passion de la glisse pure et travail ?
Je n'ai presque pas surfé cette dernière année mais c'est nouveaux pour moi, en fait j'ai décidé de me lancer dans l'immobilier et ça prend tout mon temps, plus le shape et tout , c'est pas facile a gérer mais c'est le coup a donner pour un meilleur futur et faire assez thune pour redéménager en France Je ne suis pas trop stressé, j'ai beaucoup surfé dans ma vie et il y'a quelques fois ou on ne peut pas tout faire en même temps. L'année prochaine devrait être meilleur au niveau surf, j'ai acheté une petite maison à la plage que je rénove en ce moment, je veux y passé 3 jours par semaine et surfer my ass off!!
SRP: Dans une interview datant il est vrai de quelques années, tu semblais avoir trouvé une certaine tranquillité, voir une réelle plénitude dans la province de Québec...
Québec est ma maison, j'adore le Québec, la culture, les nanas (les plus belle femmes au monde), la bouffe et surtout ma famille. J'y vais une fois à chaque année. Le temps des sucres en mars est géniale, le sirop d'érable et tout... hummm! Je ne pourrais pas vivre au Québec parce-qu'il ny a pas de vrai bon surf... Surf de rivière cest pas mon truc. Vivre a 5000 km de ma famille est une épreuve donc je fait face à chaque jours, ma sœur a 2 gamins que j'adore et les voir une fois par an n'est pas la chose la plus facile mais je suis accroc à la plage et je ne peux rien n'y faire.. Le rêve de cette vague parfaite est plus fort que moi. Ils disent (ma famille) que je suis égoïste. C'est bien vrai... comme tout surfer.
SPR: Je te laisse le mot de la fin et te remercie vivement pour ta disponibilité et te souhaite un bon séjour en France et plus particulièrement au sein de l'atelier UWL mais pour cela je suis vraiment pas inquiet !
J'ai très hâte de revenir dans mon pays ancestrale et merci de m'avoir donne cette opportunité. Shaper avec la famille Cardinal est définitivement une chance en or... « Le cordon bleu des surfboards... »
Louis ROBERT sera présent dans les ateliers d'UWL du 16 au 26 Septembre 2011.
http://www.addictionsurfboards.com/
[Liste des interviews surfrepotes]