Sur Surfrepotes.fr nous sommes férus de culture et d'histoire. Mais nous savons aussi nous tourner vers le futur. Ainsi nous suivons cette toute jeune génération de surfers qui nous épatent de jours en jours avec leurs nouvelles façons d'appréhender notre passion. Souvent étiquetés trop facilement "kids", il serait (trop) facile de les regrouper dans une même tribu, celle des jeunes audacieux qui mélangent allégrement plusieurs contre-cultures et sports dits "extrêmes" pour nous ressortir un surf qui n'a souvent plus rien à voir avec notre pratique habituelle. Ainsi lors de compétitions dédiées aux plus jeunes tranches d'âges où les figures les plus radicales s'enchainent sous nos yeux, on peut se demander si cette évolution n'est pas toute naturelle et ne pose pas de façon irrémédiable les bases du surf de demain.
Afin de nous éclairer sur ce qui est peut-être l'avenir du surf, ou du moins dans sa partie la plus compétitive, et surtout de ne pas tomber dans la faciliter qu'offrent les généralités (la fameuse étiquette "kids") nous vous proposons une rencontre avec le surfer guadeloupéen Jordan Oueslati. Ce jeune surfer nous prouve ainsi par personnalité et son sérieux que le monde du surf de demain n'est pas aussi immature et irréfléchi qu'on pourrait l'imaginer, bien au contraire.
SRP : Dans un premier temps je te propose de te présenter.
Jordan Oueslati. J’ai 16 ans. Je suis en classe de seconde. J’habite en Guadeloupe depuis l’âge de 3 ans.
SRP : Quelle est ton histoire surfique ? Et comment en es-tu venu à la compétition ?
C’est à 8 ans que j’ai commencé à pratiquer le surf et c’est mon club le " Saint François Surf Club " qui m'a inscrit à la coupe de Guadeloupe. Cela ma vraiment plu et c’est depuis que je fais des compétitions.
SRP : Tu commences à avoir un joli palmarès...
1er au King of The Groms 2009
1er au championnat de Guadeloupe Surf Cadets 2009
6ème de la Coupe Pan Américaine 2010
1er de la Coupe de Guadeloupe Surf Espoir et Open et Longboard Espoir et Open.
SRP : On peut supposer que la compétition entraine un minimum de pression. Comment gères-tu celle-ci ?
C’est assez simple, avant d'aller dans l’eau j'écoute de la musique, cela me calme et me motive. Puis arrivé dans l’eau, je me dis que je n’ai rien à perdre et tout à gagner…
SRP : Des surfers de ta génération ont la chance d'avoir l'appui de structures (clubs, fédérations, grandes marques de surf...). Et toi ?
Comme je te l’ai dit, je suis au Saint François Surf Club où je fais partie du pôle espoir depuis 3 ans. Depuis peu quelques sponsors comme Swop, Electric, 69slam et 7shores m’aident.
SRP : Les compétiteurs ont tous une motivation profonde, inscrite en eux. Peux-tu nous donner la tienne ?
Aller le plus loin possible dans le surf en compétition ou en free surf, surfer des vagues incroyables et voyager. Tout cela pour toujours plus de plaisir.
SRP : Ce n'est un secret pour personne, le surf professionnel comporte des pièges : rythme soutenu, pression des sponsors, facilité à la fête et parfois à ses "dérives"... Te sens-tu armé pour y faire face ?
Oui je le pense, j ai une bonne hygiène de vie, je ne fume pas et je consacre un maximum de mon temps de libre à m’entraîner. Plus je progresse et plus je prends du plaisir à surfer…
SRP : Le monde de la compétition demande, du moins pour les plus sérieux, énormément de préparation et d'entrainement. Est-ce facile de concilier cet état de fait avec la vie de tous les jours ?
Je m’entraîne 15 heures par semaine : de l’entrainement physique et du surf. J’ai l’avantage d’habiter en Guadeloupe et de pouvoir surfer toute l’année. Par contre ce qui est plus difficile pour moi c’est de concilier les compétitions, les voyages et l’école… Mais tout est une question d’organisation et de priorités…
SRP : T’imposes-tu une hygiène de vie particulière ?
Je me couche tôt et je me lève tôt. J’évite aussi tous les excès.
SRP : Il y a aussi ces sportifs qui ayant commencé très jeune un sport ont tout lâché du jour au lendemain par saturation voir par dégout... Connais-tu déjà tes limites ?
Non. Je ne les connais pas encore mais je pense que pour ce qui est du surf, je n’ai aucune limite…
SRP : Hors compétition, surfes-tu avec pour objectif l'entrainement ou lâches-tu cet aspect de ton surf pour revenir à une glisse plus simple et moins calculée ?
Un peu des deux : parfois je m'entraîne à surfer comme en compétition et d’autres fois je me lâche pour envoyer des figures innovantes et évoluer dans mon registre de tricks, j’y laisse libre cours à mon imagination, sans pression.
SRP : Le surf d'aujourd'hui pour toi, et que les plus vieux comme moi qualifient de "demain", s'oriente clairement vers des figures radicales rappelant de plus en plus les rampes de skate. As-tu conscience de cette évolution qui fait peur à certains et dénature pour eux et pour d'autres l'esprit même du surf ?
Le surf évolue, comme il l’a toujours fait au cours de son histoire et le passé, le présent et le futur restent toujours intimement liés, la passion est la même… Le futur a toujours semblé plus radical, quelque soit l’époque...
SRP : Penses-tu qu'il existe des limites dans ce genre de surf radical ?
Non il y a toujours un moyen d’avancer, de glisser... Je suis sûr qu’il existe plein d’autres figures à inventer. Je pense qu’il faut juste innover pour les trouver.
SRP : Selon toi, les juges autrefois un peu dépassés par cette mouvance sont-ils maintenant parfaitement à l'aise avec cette dernière ?
Oui je le pense. Maintenant dans toute les compétitions, quelles soient mondiales ou régionales, il y a toutes ces figures aériennes ou ses courbes plus serrées ou slidées… Aujourd’hui, les juges sont à même de les apprécier et de les évaluer.
SRP : Quitte à passer pour un type un peu largué, peux-tu m'expliquer comment votre génération trouve l'inspiration pour ce genre figures ? Êtes-vous tous des skaters et / ou des snowboarders et venez transposer vos figures sur la vague ?
Non, nous ne sommes pas tous des skaters. Notre inspiration nous vient surtout des surfers professionnels comme Jordy Smith. Ces types envoient vraiment des figures énormes.
SRP : Quel regard portes-tu sur tes ainés, ceux de l'époque où les planches ne décollaient pas encore ?
C’est grâce à eux que nous surfons aujourd’hui…
SRP : Si le shortboard semble être ta planche de prédilection, tu sembles être aussi à l'aise en longboard jusqu'à taquiner le nose...
Je fais effectivement des compétitions en longboard. J’en profite pour prendre d’autres appuis, d’autres trajectoires. Cela m’apporte une vision différente de la glisse. Mon approche de la vague est différente. Le longboard est pour moi complémentaire et enrichissant.
J’ai eu quelques résultats :
1er au Championnat de Guadeloupe 2009 et 2010
3ème au Championnat de France 2009
1er lors de la Coupe de Guadeloupe Espoir et Open 2010
SRP : Pour en avoir discuté avec eux, certains shapers sont étonnés voire blasés par la méconnaissance de leur art par certains jeunes compétiteurs. Est-ce pour toi un aspect du surf qui t'intéresse ?
Bien sur que cela m’intéresse, le matériel est très important pour évoluer et se perfectionner. Avec l’aide de David de Swop Surfboards, on travaille sur les shapes. Cela me permet d’avoir des planches vraiment adaptées et de les faire évoluer en fonction des mes attentes…
SRP : Tiens d'ailleurs, ton quiver se constitue comment actuellement ?
Pour le moment Swop m’a shapé 4 bombes, j'ai un Fish en 5’4", 2 planches (5’9'' x 17''1/2 x 2'' et 5’10'' x 17''3/4 x 2''1/8) pour les vagues entre 1 mètre et 2 m 50 et une 6'1'' x 18'' x 2''1/8 pour les vagues plus grosses… Elles sont vraiment folles toutes les quatre.
Elles ont chacune leurs spécificités et me permettent d’optimiser pas mal de conditions de vagues.
SRP : A ton niveau, le surf demande un matériel conséquent et performant. Trouver un ou des sponsors devient vite alors une nécessité. Cet aspect des choses est-il réglé pour toi ?
Oui et ça commence à arriver pour le matériel. Je suis rentré chez Swop, mais j’ai aussi Electric qui m’aide depuis 2 ans. Je viens aussi de rentrer chez 69slam et 7shores.
SRP : Ton surf c'est beaucoup exprimé en Guadeloupe. Vises-tu à plus ou moins court terme des compétitions plus éloignées de ton île d'habitation ?
Oui bien sûr et c’est même primordial pour évoluer, mais les voyages coûtent cher. Là je pars dans quelques jours aux Mentawaï avec David de Swop et Teiki. On y va surfer évidemment mais aussi pour y faire des photos et vidéos... Depuis le temps que j’en rêve !
SRP : Tout en restant dans le domaine du surf mais pas forcement dans celui de la compétition, quels sont tes projets ?
Surfer des bonnes vagues un peu partout dans le monde. Progresser et acquérir de la confiance dans mon surf. Découvrir et partager…
SRP : Merci Jordan d'avoir bien voulu répondre à ces questions, je te laisse le mot de la fin...
Vive le surf !!!!
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